Notre vision : encourager l’excellence artisanale
et soutenir les artisans

L’association TIMENDOTES est passionnément engagée dans la préservation et la promotion de la sfifa, une forme traditionnelle de passementerie marocaine qui décore le caftan, la takchita et la keswa el Kbira. Traditionnellement, la sfifa caractérisait la diversité des vêtements régionaux marocains à travers divers plastrons décoratifs et formes géométriques. Aujourd’hui, il continue d’être utilisé comme une garniture omniprésente qui signale discrètement le caractère et l’identité intrinsèques du caftan marocain. Cette technique de tissage ancestrale, utilisant de petites cartes enfilées sur un métier à tisser, témoigne de la riche histoire des échanges culturels entre l’Afrique du Nord et le bassin méditerranéen.

Malheureusement, l’essor de la production industrielle de masse et de la copie mécanique a eu un impact négatif sur les artisans qui tissent la sfifa à la main. Aujourd’hui, moins d’une centaine d’artisans au Maroc savent tisser les motifs les plus complexes des sfifas. Des intermédiaires exploitent les tisserands, ce qui les décourage de transmettre leur savoir-faire.
Consciente des nombreux défis auxquels les artisans sont confrontés, l’association TIMENDOTES joue un rôle crucial en les aidant à surmonter les obstacles structurels et économiques. TIMENDOTES encourage leur développement professionnel et facilite l’accès à des marchés de grande valeur garantissant aux maîtres artisans des moyens de subsistance plus équitables. Elle offre également des possibilités de formation aux femmes des communautés rurales touchées par la pandémie de Covid-19, en leur permettant d’apprendre l’art du tissage de la sfifa.

TIMENDOTES reconnaît le potentiel de l’utilisation de la sfifa pour les secteurs de la Mode et du Luxe, de l’ameublement et de la décoration. En collaborant avec des designers, elle encourage l’innovation en matière de design et de techniques de tissage, tout en documentant la sfifa afin de valoriser son rôle essentiel dans le patrimoine culturel immatériel du Maroc.
En promouvant l’excellence de l’artisanat marocain, et en soutenant les artisans dans leur créativité et leur accès aux marchés, TIMENDOTES assure la pérennité de cette importante forme d’art traditionnel. La sfifa est bien plus qu’un simple ornement décoratif, c’est une expression immatérielle et matérielle intrinsèquement liée à l’identité culturelle marocaine.

 

Origine de l’association TIMENDOTES 

Depuis 2013, Mohammed Amine Dadda, expert en planification organisationnelle et en gestion de l’innovation sociale, apporte son soutien aux artisans du Maroc qui tissent à la main des sfifas (une forme de tissage aux cartes pour créer des « passementeries » traditionnellement utilisées pour orner des caftans et jellabas, des selles traditionnelles, des objets rituels et décoratifs, etc.). La sfifa constitue une signature intégrale de la marque de couture Maison Mayad franco-marocaine, qu’Amine Dadda a cofondée avec Maximiliano Modesti en 2018. Les manteaux cocon en cachemire de Mayad et les interprétations contemporaines du caftan sont ornés de motifs graphiques de sfifa, reflètant la vision commune d’Amine et Max de nourrir l’excellence artisanale marocaine pour les marchés mondiaux du Luxe.

Entre 2014 et 2020, le travail d’Amine a consisté dans le repérage d’artisans dans des villages ruraux et d’autres qui avaient migré à Casablanca. Tout en les aidant à installer des ateliers et à se loger, il leur a apporté – sur ses propres fonds – un soutien financier suffisant pour leur permettre d’affiner leur métier, à l’abri de la pauvreté et de l’emprise d’intermédiaires qui les exploitent. Comme le dit Amine, « les artisans ont besoin de liberté pour créer et atteindre leur plein potentiel ».

En 2021, pour renforcer le soutien aux artisans et répondre aux impacts économiques dévastateurs de la pandémie mondiale, Amine a fondé l’association TIMENDOTES, poétiquement nommée d’après les TIMENDOTES, les deux poteaux verticaux soutenant chaque extrémité du fil pour former le métier à tisser simple utilisé pour tisser la sfifa.

L’objectif principal de l’association est de promouvoir l’excellence artisanale à travers la formation et le soutien aux artisans marocains, qui tissent la sfifa à la main. Les ventes de la Maison Mayad contribueront à financer ce projet. L’un des objectifs principaux de l’association est d’aider les artisans à développer leurs compétences et à accéder à de nouveaux marchés à forte valeur ajoutée pour leur artisanat. L’association TIMENDOTES reconnaît que les applications potentielles de la sfifa dans les domaines de la Mode et du Luxe, de l’ameublement et de la décoration d’intérieur sont illimitées – si les conditions nécessaires à l’excellence artisanale sont réunies et maintenues.

 

Les défis pour les tisserands de sfifa 

La prolifération de copies bon marché fabriquées à la machine depuis les années 1990 a considérablement réduit les marchés pour la sfifa tissé à la main, plus coûteuse. Selon nos estimations, le nombre d’artisans capables de tisser les motifs traditionnels les plus complexes est aujourd’hui inférieur à une centaine dans tout le Maroc. Cependant, de nombreux artisans parmi eux sont désormais trop âgés pour tisser, et seuls quelques membres de la jeune génération connaissent les motifs les plus complexes. Le savoir-faire est transmis entre les générations et s’acquiert par la pratique. Il n’existe pas d’institut de formation formel et la documentation écrite sur le tissage aux cartes au Maroc est très rare.

Bien que la sfifa soit manifestement un élément essentiel de la riche culture matérielle de l’habillement et du symbolisme ornemental marocains, les tisserands reçoivent souvent des salaires qui leur permettent à peine de survivre. L’association TIMENDOTES a mené des entretiens approfondis avec des artisans dans tout le Maroc, dont Mohamed, quarante ans, qui vit aujourd’hui à Kénitra. Il a commencé à fabriquer des sfifas à l’âge de treize ans, en apprenant le métier auprès de son père. Mohamed raconte que son village étant éloigné de toute école, il n’avait aucune possibilité d’éducation formelle et qu’apprendre à tisser la sfifa était son moyen de gagner sa vie.

En 1999, à dix-huit ans, il se rend à Casablanca pour travailler chez des gens de sa région. Il vivait avec dix à douze autres travailleurs entassés dans un petit appartement. Tous travaillaient six jours par semaine, de huit heures du matin à minuit, le dimanche étant leur seul jour de repos. Le salaire de base était de 2 dirhams (0,19 €) par mètre et pouvait atteindre 5 dirhams (0,38 €) par mètre pour les sfifas aux motifs compliqués, pour lesquelles plus de trente cartes doivent être utilisées sur la chaîne dans le cadre d’un processus complexe et fastidieux. Compte tenu du temps nécessaire pour tisser la sfifa, Mohamed gagnait environ 50 dirhams (4,76 euros) par jour, ce qui lui procurait un petit revenu d’environ 120 € par mois.
Le plus choquant est que les bas salaires versés à Mohamed et ses collègues était un moyen pour leurs employeurs de les maintenir en état de dépendance et de garder le contrôle sur eux, ne percevant à chaque fois qu’une partie de son salaire final.

Chaque semaine, Mohamed et ses collègues ne recevaient qu’une petite partie de leur salaire comme argent de poche le dimanche pour aller au hammam, chez le coiffeur, au café ou pour acheter des cigarettes. Les artisans s’accrochaient à ces petits réconforts à la fin d’une semaine de travail exténuante de six jours où ils étaient entassés tout en travaillant seize heures par jour dans des ateliers clandestins.
Lorsque les artisans retournent dans leurs familles à l’occasion des deux grandes fêtes musulmanes (Aïd al-Adha et Aïd-al-Fitr), ils ne reçoivent que 60 % du salaire qui leur est dû et sont donc contraints de retrouver ces terribles conditions de travail après leurs rares vacances. L’Organisation internationale du travail (OIT) qualifie de « travail forcé » les pratiques des employeurs qui retiennent ainsi les salaires.

Mohamed connaît de nombreux modèles transmis de génération en génération, jamais écrits mais appris par l’observation. Malheureusement, il refuse de transmettre ce savoir à ses enfants. En raison de son expérience de l’exploitation et des bas salaires, il a conclu que l’on peut « […] tirer une maigre subsistance de ce savoir, mais que l’on ne peut rien construire avec ». Il a beaucoup souffert : il a travaillé toute sa vie depuis son plus jeune âge, mais n’a gagné que très peu. De plus, sa santé et sa vue ont été affectées par ces conditions de travail difficiles et indécentes.

 

Connaissance et fierté de l’héritage du tissage de la sfifa 

L’association TIMENDOTES est profondément consciente des défis auxquels sont confrontés les artisans comme Mohamed. L’association travaille avec des artisans et des artisanes hautement qualifiés à Casablanca et dans la province de Taounate. Elle cherche à mettre en place des structures organisationnelles, tout comme un soutien et un financement qui permettront aux artisans comme Mohamed d’être appréciés à leur juste valeur, soutenus et de se voir garantir une rémunération équitable pour leur travail. Toutes ces initiatives permettront de construire un avenir durable pour ces artisans et leurs familles. En outre, ils bénéficieront d’un accompagnement professionnalisant afin de transmettre leur savoir-faire, et de devenir des enseignants et formateurs de cette technique ancestrale.

L’association TIMENDOTES aidera les artisans à prendre conscience de la valeur de leur artisanat en tant qu’élément de l’histoire culturelle du Maroc, et les guidera dans leur ouverture à de nouveaux marchés à forte valeur ajoutée pour leur travail. Encourager la conscience et la fierté de ce patrimoine va de pair avec l’accompagnement des artisans vers plus d’innovation et une valorisation de leurs compétences sur le marché mondial. L’histoire culturelle est donc mise en relation dynamique avec l’économie créative d’aujourd’hui.